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Une autre particularite bien plus frequente que celle dont nous
venons de parler, c’est le rime riche. Sur dix rimes il n’y a que
Jleux, souvent qu'une seule "* me gsoit pas riche Ce rapport est
maintenu pour des vers d’un petit nombre de syllabes, quoique le
‚etour frequent‘ de la rime augmente la difficulte. Dans la Chasse
du Burgrave en cinquante stances de 1a forme:
Qu fuir? dans le lae! Il s’v plonge,
Longe
Le bord ol maint buisson rampant
Pend.
il n’'y a que la seule rime jappe:, happe qui ne soit pas riche. Et
dans ces rimes A echo qui pour tout autre seraient un tour de force
extraordinaire Victor Hugo n’a fait que depasser d’un peu la nıvoyenne
de ses rimes riches.
On sait que les poetes se contentent de la rime suffisante pour
des terminaisons qui riment toujours avec une consonne d’appui,
au cas qu'il s’agisse d’un monosyllabe. Victor Hugo, au contraire,
est A la recherche de la rime riche aussi pour les mots d’une syllabe
quand me6me ils ont des terminaisons peu nombreuses dans la langue.
Les rimes triviales sont tres rares chez Ilui, les combinaisons originales
et frappantes, parfois bizarres, abondent; la »lupart en sont telles
qu’'on les chercherait en vain dans les poetes du dix-septieme ou du
dix-huitiöme siecle. Si Voltaire sg’est plaint que pour rimer & «hommes»
il faille toujours recourir A des chevilles telles que «nous tous tant
que nous sommes» ou «dans ce siecle ol nous sommes», Victor Hugo
a su vaincre cette diflieulte, il dispose de «pommes», il parle de
«Gomorrhes et Sodomes», il met au pluriel l’unique et eternelle
«Rome». Mais quand Boileau fait planter a son jardinier l’if et le
chevrefeuil, pour avoir une rime & sa maison d’Auteuil, il est fort
A eraindre que la rime n’ait joue des tours analogues au poete du
dix-neuvieme sieele. Le noble seigneur Ruy Gomez, rentrant la nuit
trouve deux hommes chez lui; le bon sens voudrait qu'il les fit jeter
a la porte. Pas du tout!
Quand nous avions le Cid et Bernard, ces geans
De l’Espagne et du monde allaient par les Castilles,
Honorant les vieillards et protegeant les filles ...N
Hernanı I 3.